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Monographie de Bourg d'Oueil - 1886 -

MONOGRAPHIE De BOURG D OUEIL


Canton de Bagnères de Luchon

Arrondissement de Saint-Gaudens

Département de la Haute-Garonne

Année 1886

Bourg-d’Oueil
Situation géographique ; limites ; étendue ; distance aux chefs-lieux du Canton ; de l’arrondissement, du département.
Au sud de la Haute-Garonne, et dans le canton de Luchon, est une charmante petite vallée étroite et longue de dix kilomètres ; Bourg est la dernière des communes que l’on y rencontre. Le village s’élève en amphithéâtre au pied d’une montagne et est orienté vers le midi ; un cycle ravissant l’entoure de toutes parts et ferme la vallée, la séparant de la Barousse, des Bareilles, du Louron et du Larboust.
Les montagnes en cycle sont : le Bosquet faisant suite à Rustier ; on voit au-delà Cucous le vallon de Coulantigue couvert de prairies, Moncassan, le Cap de la Pène, Monné dont l’élévation est de 2147 mètres ; le Col de Pierrefitte, haut de 1855 mètres, Téchouède, Portet, la Crète du Lion et la Lit, qui rejoint Ourraou ; le plus haut pic de ce côté est de 2004 mètres.
Bourg est situé par 42°50’38’’ de latitude nord et par 1°50’15’’ de longitude ouest (Méridien de Paris) ; c’est un des plus hauts sites de la vallée d’Oueil. Il est borné , au nord par Ferrère (en Barousse – Hautes – Pyrénées ) ; à l’ouest par les Bareilles, au sud-ouest par le Louron et au sud par le Jurvielle et Poubeau (Larboust) . Cirès le borne à l’est et au sud-est.
L’étendue du territoire est de 950 h, 28 a, 45 c qui sont ainsi répartis :

Terres 73h, 77 a, 20 c
Prés 137h, 30a, 65c
Sapinières 102h, 42a, 00c
Bois et pâtures -Patus 667h, 87a, 70c
Terres vaines, broussailles et rocailles 4h, 31a, 20c
Jardins 0h, 50a, 80c
Superficies des propriétés bâties 1h, 08a, 90c

Total : 950h, 28a, 45c
Bagnères-de-Luchon (chef-lieu de canton) est à un peu moins de 14 kilomètres , Saint-gaudens (chef-lieu d’arrondissement) est à 62 kilomètres, et Toulouse (chef-lieu du département) est à 150 kilomètres.

Description physique du pays : relief du sol : montagnes , nature des roches qui les constituent.
C’est avec un doux ravissement qu’on remonte cette gracieuse vallée dont les fraîches prairies bordent la Neste. Au-dessus, les champs sont dominés par des forêts de sapins, de hêtres et de chênes ; le tout présente un paysage pittoresque fait à souhait pour le plaisir des yeux. Au fond, la Neste, tantôt précipite ses eaux sur un lit obstrué de pierres et de rochers, tantôt se divise en mille rigoles qui s’écoulent paisiblement au milieu des prairies qu’elles arrosent. A partir de Saint-Paul la montagne à gauche est couverte d’immenses forêts de sapins aux couleurs sombres ; la montagne de droite avec ses bois de chênes ou de hêtres, ses pâturages et ses rochers, présente un contraste saisissant.
Bourg est dominé par une église gothique du XV ème siècle, nouvellement restaurée. En face est une forêt presque à pic, appartenant à l’Etat ; sur le flanc des montagnes qui le séparent des Bareilles et du Louron sont d’autres petits bois également à pic et appartenant à la commune ; au-dessus du village on ne voit que des broussailles, de maigres pacages, des terres stériles et de vastes rochers.
Au pied du Bosquet et de Rustier se passe un phénomène digne d’être signalé aux géologues : les terres s’affaissent avec rapidité de telle sorte que de Bourg, on aperçoit le Plan Mardan ( Plateau du Bélier) , caché, il y a quelques années à peine , par les plis du terrain . Le même phénomène s’observe d’ailleurs au plan (entre Caubous et Cirès) et dans d’autres endroits de la vallée.
Triste en hiver et en automne, la nature s’y étale dans toute sa beauté pendant les mois de juin et de juillet ; les fleurs les plus variées, les jonquilles , les primevères, l’arnica, les pensées sauvages et mille espèces pyrénéennes forment de jolies corbeilles ou de vrais tapis de fleurs. Au mois d’août, bois , champs et prairies prennent une teinte jaunâtre ; (la teinte d’automne) qui est encore agréable à voir à cause de la disposition du paysage.
Les montagnes appartiennent aux terrains d’érosions, la plupart des roches sont des calcaires presque toujours nuancés par des traces de fer et d’antimoine ; les carrières de marbre y sont nombreuses et quelques-unes pourraient être exploitées avec profit. Les marbres sont rouges, noirs ou verts ; les rouges se composent de petits fragments, et les noirs de fragments plus grossiers soudés ensemble par un ciment calcaire naturel. Les verts ont un grain assez fin et sont susceptibles de recevoir un poli brillant, quoiqu’ils ne soient pas aussi beaux que ceux de Caubous.
Les dépôts de schiste sont étendus ; on en retire en quelques endroits, des ardoises épaisses et solides ; elles sont préférables, dans la vallée aux ardoises du Louron, du Luchon et du Larboust, celles-ci résistant beaucoup moins sous les amas de neige qui tombent certains hivers.
Parfois on rencontre des blocs de granit blanc avec paillettes micacées ; je ne saurais admettre (comme le font quelques géologues) qu’ils ont été entraînés des Montagnes d’Oo dans les magmas glaciaires ; je crois plutôt qu’ils ont été portés des Montagnes de Saint-Paul ou de Saccourvielle .
Non loin du village , au bas de Pierrefitte sont de nombreux coquillages fossiles affectant tous à peu près la même forme et qui paraissent être des coquillages marins. J’en ai plusieurs en ma possession ; les plus considérables sont ronds et de la grosseur de poing, d’autres sont gros comme des œufs et les plus petits sont légèrement allongés.
Le Monné ____ a défaut de tout autre curiosité naturelle, je ne puis passer sous silence le spectacle grandiose dont on jouit sur le Monné . L’ascension du pic se fait en été , du 15 juillet au 31 août ; on y monte le plus souvent à cheval. Les touristes y affluaient autrefois, ils partaient pendant la nuit de Luchon et tâchaient d’arriver de bonne heure pour assister au lever du soleil. De cette hauteur on aperçoit une partie de la chaîne des Pyrénées, et l’on a devant soit les glaciers d’Oo, de la vallée du Lis, de Vénasque et de la Maladetta .
Les premiers rayons du soleil éclairent les sommets ; bientôt l’astre du jour s’élève semblable à une meule rougie et inonde les montagnes de sa lumière. Une description est incapable de faire comprendre l’enthousiasme qui s’empare de l’âme à cette vue. Ce moment d’ivresse est de courte durée, il est vrai ; mais il suffit pour dédommager des fatigues de la route.
Cours d’eau ; son débit ----Eaux Potables
Les ruisseaux de Coulantigue, de Hité, de Téchouède et de Portet, prenant leur source dans quatre petits vallons enchâssés dans la montagne ; se réunissent au-dessus du village à trois cents mètres des maisons et forment la rivière de la Neste qui va grossir l’Onne au-dessous de la chapelle de Saint-Aventin. C’est à tort que la carte du département donne le nom d’Onne au cours dont nous nous occupons ; les habitants et les géographes ne l’ont jamais appelé ainsi.
La Neste, sur toute sa longueur (10 kilomètres environ) coule du nord-ouest au sud-est. Son débit varie tous les jours ; dans les époques de sécheresse les eaux sont basses ; elles sont élevées au contraire, au printemps, lors de la fonte des neiges ; la moindre pluie les enfle rapidement et les orages les font sortir de leur lit. Le sol étant incliné et de nature rocheuse, chaque ravin coule avec impétuosité et les crues sont subites. Le débit moyen, à la jonction des quatre ruisseaux, ne dépasse pas 45 hectolitres par minute ; plus bas, la Neste reçoit encore d’autres petits ruisseaux peu importants.
Les Eaux ( et du reste toutes celles qu’on rencontre dans la commune) se distinguent par une fraîcheur très agréable au goût. Les sources les plus pures abondent dans les bois, au pied des rochers et dans les pâturages ; je me contenterai de citer la source de Règues ( des rochers) dans la forêt de l’Etat, la Hont Bouno (bonne fontaine) à 800 mètres du village, la Hont de l’Oiseau près du col de Pierrefitte et la hont de la Cabane au pied du Monné .
Altitude ; climat, vents ; pluies ; températures ; salubrité
Le village est un des plus élevés peut être le plus élevé de la Haute-Garonne . La commission du nivellement des Pyrénées, prenant pour base de ses opérations le niveau de l’Atlantique près de Royan, à fixé à 1350 mètres l’altitude du lieu au-dessus de la mer.
Au commencement du siècle, les hivers étaient rudes , le froid intense et la neige abondante ; souvent on était obligé de sortir des maisons par les fenêtres de l’étage supérieur et on allait soigner les bestiaux dans les écuries par des tunnels ouverts dans la neige même. Des avalanches terribles descendaient des montagnes et emportaient plus d’une fois des écuries et des maisons. Depuis vingt ou vingt-cinq ans les hivers ont été peu rigoureux, si j’en excepte celui de 1870.71 et celui de 1884.85.
Dans le printemps , le milieu du jour est tempéré et les nuits sont froides ; la fraîcheur de la nuit se fait sentir même pendant l’été. En hiver la température moyenne est de 3° au dessous de zéro ; elle est de 4° au dessus de zéro dans les mois de mai et de juin et de 12° à 13° au dessus de zéro dans le fort des chaleurs.
Les vents dominants sont ceux de O.N.O et ceux du S.E ; les premiers sont froids, amènent la pluie et sont appelés par les montagnards « les vents Baroussais » les seconds sont
plus chauds et amènent des brouillards épais ; les uns et les autres sont presque toujours assez faibles. Le vent d’O accompagne d’ordinaire les grands orages et les tourmentes ; il se déchaîne avec fureur, abîme les toitures en chaume, renverse les cheminées et arrache ou brise des centaines de sapins. Au printemps, si le S.O souffle dans les orages (ce qui est rare) il est la terreur des habitants ; presque toujours un tel orage ne passe pas sans que de gros grêlons abîment les récoltes .
Les hommes sont robustes et jouissent d’une bonne santé ; il n’y a guère de malades qu’en mars et en avril, mais alors les coqueluches, les pleurésies, les fluxions de poitrine et les bronchites sont nombreuses ; les neuf dixièmes des décès sont causés par des refroidissements. Quant aux maladies épidémiques telles que la rougeole et la fièvre typhoïde, elles ne se montrent dans la vallée qu’a de très longs intervalles.
II

Chiffre de la population d’après le recensement de 1881.
Le chiffre tend à diminuer ; causes.
Le recensement de 1881, Caunnaire et Joanne (Géographie de la Haute-Garonne) donnent 105 habitants comme chiffre de la population ; l’Orion du diocèse l’élève à 171 . Ayant fait un recensement, scrupuleux, je n’ai plus trouvé que 99 habitants ; cette diminution est occasionnée par l’émigration vers les villes, où les jeunes gens et les jeunes filles se placent comme domestiques ; plusieurs hommes entrés aussi dans la douane, dans la gendarmerie, dans le clergé et dans le corps enseignant. D’un autre côté ; le nombre des enfants devient tous les jours moins considérable ; les parents s’efforcent de retenir le …de fortune possible dans leur maison et ne veulent pas imposer des charges trop lourdes à l’aîné , qui paie d’ordinaire en argent les parts de ses frères . En ce moment li n’y as pas à Bourg plus de quatre enfants ages de moins de 3 ans, et il n’y en a que quatre ayant de 3 à 5 ans .
Nombre de feux ; organisation municipale ; fonctionnaires.

La commune est groupée dans un espace restreint, avec ses rues étroites , humides et sales , le nombre de maisons est de 21 et celui des écuries de plus de 40 .
Le Maire actuel est Monsieur Bertrand Jourdan ; il a pour adjoint Monsieur François Jamme . L’influence du Maire est immense ; on ne connaît guère d’autre autorité et on peut le considérer comme le petit seigneur de l’endroit ; il parle , et tout plie devant ses ordres .
Un garde champêtre, qui cumule les fonctions de valet mandataire, de crieur public et de carillonneur , est chargé de la police des champs et des propriétés. Le garde est Monsieur Deux dont la résidence est à Saccourvielle .
Culte- Finances ( Perception ) ; Postes et Télégraphes .
Tous les habitants appartiennent au culte catholique, et ignorent presque ce que c’est qu’un juif ou un protestant. Depuis 1822, Bourg est devenu une simple annexe de Cirès ; c’est le curé de cette paroisse, Monsieur Bouche, qui la dessert deux dimanches sur trois ; l’autre dimanche est accordé à Caubous .
Le Percepteur de St Aventin, qui demeure à Luchon régit, pour les finances, tout le haut de la vallée.
On dépend, pour les postes et télégraphes, du bureau de Bagnères-de-Luchon : un facteur de relais prend les dépêches à Mayrègne vers 9 heures et les porte aussitôt après avoir fait la distribution de Mayrègne, de Caubous et de Cirès.

Valeur du centime- Revenus ordinaires-
La valeur du centime est de 0,354602. La commune n’a d’autres ressources que les impositions. Moins heureuse que Cirès et Caubous, elle ne peut plus avoir recours à des coupes depuis qu’un jugement lui a enlevé ses forêts au profit de l’Etat.

III

Productions naturelles ;plantes, insectes, oiseaux, animaux.

Après la vallée d’Esquierry, la vallée d’Oueil et surtout le territoire de Bourg, est la partie du canton qui offre au botaniste le plus grand nombre de plantes rares et précieuses ; les espèces de Saxifrages (1) y abondent et il serait facile sans sortir de la commune, de former vite un herbier important. Les touffes de Gentiane se rencontrent à chaque pas ; il en est de même de l’arnica et de l’aconit, dont on fait un certain commerce. On m’a assuré que la belladone est commune : je doute de l’exactitude de ce renseignement, car je ne l’ai pas encore rencontrée une seule fois . Dans une promenade j’été surpris de pouvoir recueillir l’Aster Pyrenaeus (2), à Pierrefite ; jamais les savants ne l’avait signalée dans ces parages .
On admire une multitude de beaux coléoptères , dans les mois de juillet, août et septembre ; les plus dignes d’attention appartiennent aux familles des carabidés (3), des chrysomèdes (4) et des bouviers. La Rosalia Alpina est aussi commune dans les frênes avoisinant une petite chapelle de St Blaise, du côté de Cirès. Les pharmaciens s’approvisionnent de cantharides (5) près du ruisseau de Portet ; elles y foisonnent vers le mois de juillet et dénudent souvent les arbres des environs .
Les Lépidoptères (6) ne présentent pas un grand nombre de variétés ; bien peu offrent quelque intérêt ; ils sont en général petits et se retrouvent dans tout le reste du canton.
Le serin, le chardonneret, la mésange, le moineau et le pinson , tels sont les oiseaux les plus ordinaires ; pendant l’été ils se tiennent dans les bois ou sur les montagnes ; beaucoup émigrent. Ils s’approchent du village au printemps et en automne ; on ne les voit plus en hiver.
J’ai fais une remarque qui fixera peut-être l’attention des ornithologistes ; on prétend que les oiseaux ne chantent guère sous les tropiques et dans les pays où la chaleur est trop forte ; la même chose arrive sur nos montagnes : le serin et le chardonneret poussent à peine quelques petits cris et le moineau est presque muet. On dirait que les chants gracieux et les douces roulades sont réservés exclusivement aux climats tout à fait tempérés.
Les bêtes féroces, telles que ours et loups, ont à peu près disparu ; l’ours seul nous arrive parfois des Pyrénées et menace les troupeaux. Les montagnes servent de retraite à de nombreux renards et à des chats sauvages ( gats arroudaous, chats voyageurs) le fléau des poulaillers où ils entrent . Les forêts sont également peuplées d’écureuils, de martres, de fouines et de putois. En hiver, la Mustella-Herminéa (7) , quelques rats et certaines taupes prennent une fourrure blanche .
Les reptiles comprennent la couleuvre et deux ou trois espèces de vipères. Les lézards fourmillent dans les champs et sur les rochers. La salamandre se montre partout ; elle se traîne péniblement , après les pluies fines, sur les terrains humides, sur les routes et jusqu’auprès des maisons ; peut être même doit-on attribuer à sa présence la mortalité qui règne de temps en temps dans les écuries. Il serait nécessaire d’enlever alors le fumier et de nettoyer tout avec soin, comme le conseillent les auteurs s’occupant d’élevage ; jamais je n’ai pu y décider nos incrédules montagnards.
Les batraciens ne sont représentés dans la commune que par trois espèces d’Anourcs : la grenouille, la rainette et le crapaud qui se reproduisent avec une fécondité étonnante. Dans le printemps , les Luchonnais, friands des grenouilles de Bourg , ne renoncent pas à faire 12 kilomètres , recherchant ces bêtes inoffensives dans les rigoles des prairies et en emportent de pleins sacs.

Bois et forêts –Chasse et pêche
Le gouvernement possède une superbe forêt de sapins sur le flanc de la montagne qui sépare Bourg du Larboust ; une seconde forêt de même essence , située au dessous du col de Pierrefitte appartient à la commune. Toutes deux sont soumises au régime forestier et les habitants n’ont qu’un simple droit de chauffage et de « marronage ». La forêt communale n’as pas plus de 5 hectares de superficie ; nul reboisement n’y est opéré et elle dépérit à vue d’œil. Chaque famille prend sa part de bois et s’occupe peu du reste ; ajoutez à cela les sapins abattus en contrebande et vous comprendrez sans peine ce que sera dans cent ans cette gentille forêt qui ne demanderait qu’a vivre et à s’agrandir.
La forêt de l’Etat est, de la part de l’Administration l’objet de soins qui ont pour but, sinon d’en augmenter la valeur et le revenu, tout au moins de la conserver dans un état satisfaisant de prospérité.
Sur le flanc du Bosquet, on aperçoit des groupes de chênes, de bouleaux et de coudriers (8) rabougris ; ils méritent moins le nom de bois que celui de broussailles. Pour énumérer toutes les essences d’arbres connues , il ne nous resterais à faire mention que des frênes et des ormeaux plantés autour des propriétés.
Rien ne saurait égaler la délicatesse des truites de la Neste ; on les pêches à la main et, quoiqu’on en prenne énormément, il y en a toujours assez en abondance.
Le chasseur rencontre quelques lièvres et quelques compagnies de perdreaux , sur les montagnes, quelques cailles au fond de la vallée, à l’époque de l’ouverture de la chasse , et quelques grives , en automne dans les forêts. Des bandes de ramier passent au dessus de la tête , à des hauteurs considérables ; rarement elles descendent et s’arrêtent dans les bois ; elles s’envolent à tire-d’aile depuis le Larboust jusqu’en Barousse . Si l’on veut véritablement du gibier , il faut aller le chasser dans le Larboust, en Barousse et aux Bareilles.

Productions artificielles ; quantités ; culture principale ; procédé de culture .

Les terres sont, en général peu fertiles, et on n’obtient une récolte satisfaisante qu’a force de fumier. L’orge est la seule céréale qui récompense l’agriculteur de ses peines ; aussi sème-t-on peu de blé, de seigle, de méteil et de sarrasin. Les autres productions principales sont les pommes de terre ; les lentilles et les pois. Chaque famille récolte aussi le chanvre et le lin nécessaires à la fabrication du linge de maison.
Le rendement annuel de chacune de ces cultures est de 400 hectolitres pour l’orge, 100 hectolitres pour le blé, 100 hectolitres pour le seigle,800 hectolitres pour les pommes de terre et 20 hectolitres pour les pois . Les récoltes de méteil et de lentilles sont insignifiantes .
Les prairies ont donné 5000 quintaux de foin et 1200 quintaux de regain. On n’a pas besoin de fumer , celles qui sont arrosées par une canalisation soigneuse, mais il est nécessaire, pour les prés situés sur la montagne , d’y parquer les brebis , dont on utilise les crottins et l’urine. Cette dernière est regardée par les montagnards comme le meilleur des engrais .
On se sert pour travailler les champs, d’araires légères et primitives ; c’est le seul mode de culture, l’emploi de la charrue devenant impossible ou tout au moins bien difficile à cause de l’inclinaison des terrains.
Troupeaux
Je ne dirai presque rien des juments et des vaches ; les premières sont surtout utilisées pour le transport des foins , des récoltes , du fumier et du bois ; les secondes sont employées dans le labour. On compte pour peu le revenu de leurs produits, du lait et du beurre .
Occupons nous d’un animal autrement utile et même presque nécessaire aux habitants de Bourg ; je veux parler de la brebis . L’élevage des bêtes à laine se fait sur une grande échelle : réunies en troupeau elles pâturent sur la montagne pendant la plus grande partie de l’année et restent à l’étable pendant les seuls mois de l’hiver. A cette époque, les brebis mettent bas et , dès les premiers jours de mars, leurs agneaux peuvent déjà aller paître avec elles . En juin, ils sont sevrés et les brebis mères montent sur la montagne où leur lait sert à faire un fromage qui à une certaine réputation . Trois bergers et un fruitier ou deux s’établissent dans une cabane au pied du Monné ; là, pendant deux mois et demi, tandis que les brebis broutent les herbes tendres et aromatiques, on fait ces délicieux fromages de Bourg, les délices des gourmets.
Une brebis rapporte annuellement à son propriétaire :
Un agneau, valant 12 f
4 kilogr de fromage, valant 8 f
½ kilogr de laine , valant 1,50 f
_________
Total 21,50 f
La dépense en fourrage et en grain est peu considérable, en sorte que tout est profit pour l’éleveur. Si l’on supprimait les brebis, Bourg serait non pas peut-être dans la misère, mais au moins dans la gène ;le commerce serait nul. Le village possède 4000 bêtes à laine, 150 vaches et 50 juments ; en été, on les conduit sur les montagnes de la commune, et de préférence, sur celles de la Barousse où l’on a droit de pacage.

Carrières ; Moulins
Les nombreuses carrières de marbre et d’ardoises sont toutes inexploitées, à l’exception d’une ardoisière où les habitants vont se fournir pour leurs besoins personnels. La commune ne songera jamais, croyons nous à aucune exploitation, et cependant le commerce des ardoises et du marbre serait pour elle une autre source de richesse.
Deux petits moulins possédés en commun par les différentes familles et mis en mouvement par les canaux de la Neste, suffisent amplement pour moudre le grain nécessaire. Un petit moulin à scie, bâti en amont des deux autres, divise en planches les quelques roules qu’y apportent les habitants. Un scieur étranger y travaille deux fois par an , au printemps et en automne.
Voies de communications ; routes ; moyens de transport. ----Moyens de communications
avec les chefs-lieux du canton, de l’arrondissement et du département.
Un chemin d’intérêt commun conduit à la route départementale du Larboust et mène à Bagnères ; de là on gagne St Gaudens et Toulouse par le chemin de fer. Le chemin d’intérêt commun est plus mal entretenu dans la commune que partout ailleurs ; en hiver, les avalanches y amoncèlent la neige, la terre et les pierres ; il est même dangereux d’y passer aux autres époques de l’année : des pierres se précipitent fréquemment à travers des prairies à pic et menacent le voyageur peu attentif. Monsieur Pemmartin , curé de Cirès y fut tué le 10 mars 1884, par une pierre venant de la montagne. Il serait à désirer que l’administration des Ponts et Chaussées changeât cette route et la plaçât une trentaine de mètres plus haut ; les dangers y seraient moins imminents.
Il n’y a pas de voitures pour les voyages ; une petite charrette porte à Bagnères les fardeaux les plus lourds ; les autres transports se font sur le dos des chevaux. Quant aux montagnards, ils se rendent à Luchon, tantôt à cheval tantôt à pied.
Commerce local ; mouvement des échanges. ---Mesures locales encore en usage.
Le commerce se fait, en général, avec Bagnères-de –Luchon ; le mercredi, jour de marché, on y porte la laine des brebis, les céréales, les pois, les œufs, le beurre et le fromage de Bourg, renommé dans tout le pays. Les bouchers de Luchon montent jusqu’au village et achètent les moutons, les brebis et les veaux destinés à la boucherie. Les autres moutons, les chevaux, les mulets et les vaches sont conduits dans les foires de St Béat, d’Aspet, de St Girons, de Bagnères, d’Arreau et de Castelnau-Magnoac.
Il y a quelques mesures anciennes encore en usage ; ce sont le Coupeau (Mesure de capacité contenant 14 litres) ; la Couperade (Mesure agraire équivalente à 1,are87) ; la Canne (1,m80), l’Empan (0,m222), le pied , le pouce, la ligne, etc. En patois on parle de pistole (10 francs). Pour les liquides on est familiarisé avec les mesures métriques. Pour les grains on se sert du Coupeau de 14 litres et du Sac de 98 litres . L’emploi de l’hectolitre, dont la contenance ne diffère guère du Sac, tend de plus en plus à se répandre . En ce qui concerne les poids, on fait un plus fréquent usage de la livre (400 grammes), du quart et du quintal de 50 kilogrammes , qu’on ne le fait du kilogramme et du quintal métrique.
IV

Etymologie du nom de Bourg-d’Oueil. ----- Histoire

Nous croyons devoir donner à la fois l’étymologie de la commune et celle de la vallée. Comme l’indique le mot seul, Bourg vient de Burgus et désigne une forte agglomération. Quant à la qualification d’Oueil, les savants sont très partagés : les uns font dériver ce mot de la corruption de terme latin Ovium, en patois Goueillo ( ou Vallis Ovium.—Vallée des brebis) ; les autres le font dériver du terme latin Oculi (ou Vallis oculi,--- Vallée de l’œil). Ce qu’il y a de certain c’est que les manuscrits anciens l’appellent presque toujours la « Vallis Occuli », d’ou il résulterait que l’origine du mot viendrait réellement de la corruption du terme Oculi latin. Toutefois, je ne comprends pas pourquoi on aurait ainsi nommé la vallée, quoique l’œil se dise Goueil, en patois, je préfèrerais le faire dériver de Brebis, à cause des troupeaux considérables qu’elle renferme.
Le peintre romain Caze adoptant, avec plusieurs savants la même opinion, représente la Vallée sous la forme d’une vierge ayant une brebis à ses côtés ; cette fresque se trouve dans la salle des Pas-Perdus des Thermes de Bagnères -de Luchon .
Avant la Révolution , la commune faisait partie du gouvernement de Guyenne et de Gascogne. – Election de Comminges. –Châtellenie de Fronsac (ou Frontignes) .—Généralité d’Auch. – Le seigneur de Mauléon, en Barousse soumis au seigneur de Barbazan, y percevais la moitié des droits royaux avec son coseigneur de St Paul, et avait le droit d’y exercer avec lui la justice, sous la juridiction du comte de Comminges . C’est ce qui résulte des parchemins du XIV ème, du XV ème, du XVI ème, et du XVIIème siècles , qui se trouvent entre les mains de Monsieur Gerdessus, maire de Cirès et de Monsieur Comet, propriétaire à Bourg. Malgré leurs droits, la justice ne fut jamais rendue par eux, parce que « Qui avait le Roy pour compagnon était censé l’avoir pour maître .» Telle était la maxime en honneur dans le Parlement de Toulouse.
La commune, ou plutôt, la communauté ( comme on s’exprimait alors) avait un Consul mis en charge le jour de l’Annonciation par le « Vieux sortant » ; il prêtait « foy, hommage et serement de Fidélité » au Roi de France, avec le droit de juger les causes civiles « jusqu'à cent sols » taxais le pain, la viande, l’huile et autres choses comestibles ; ses pouvoirs étaient à la fois ceux de Maire, de juge de paix et de percepteur. En maintes circonstances la perception des droits royaux était affermée à de simples particuliers ; c’est ainsi que par acte dressé chez M. Parenteau notaire royal à Saint-Béat, Messieurs Cargue et Baylac furent reconnus fermiers » des dits droits » , le 18 décembre 1780 . Cet acte se trouve entre les mains de Monsieur Comet .
Dans les parchemins du XIIIème , XVIèmè, XVIIème, et XVIIIème siècle, je remarque que les Consuls de la vallée prenait la particule de avant leur nom ; c’est ce qui explique sans doute la prétention de certaines familles de basse extraction à des titres nobiliaires . Peut-être était-ce là aussi la prétention des d e Caubous .
Les habitants pouvaient abattre du bois pour chauffage et constructions dans les forêts ; ils avaient de même la faculté de louer (Arrenter) ces mêmes forêts à qui bon leur semblait et de s’approprier le prix de l’ »Arrentement » sans être tenus d’en rendre compte à personne . Le privilège de la chasse dans tout le consulat leur était exclusivement réservé.

Quant à l’histoire religieuse, Bourg a toujours eu son curé avant la Révolution. Erigé en succursale par les décrets de l’an XIII et 1807, il fut desservi par M. Lassale (de 1801à 1810) et par M. Roques (de 1810 à 1815) . En 1822 il devint une simple annexe de Cirès, et la privation de curé établit entre l’annexe et la succursale des rivalités qui ne finiront jamais. On est d’autant plus irrité qu’on ne possède pas même le binage complet et que pendant l’hiver, il est très pénible ou même dangereux ( à cause du mauvais état du chemin ) de se rendre à la messe de Cirès .
Traditions et Légendes
Nous devrions , à côté des traditions et légendes – mentionner ici les mouvements ; l’histoire des uns et des autres se Confond. C’est pourquoi nous serons obligé de parler de certains monuments , sauf à en dire encore deux mots plus tard.
Sur le col de Pierrefitte est une énorme pierre plantée en terre et servant autrefois d’autel aux Celtes ; à droite , à quatre mètres de distance sont plusieurs autres petites pierres arrangées symétriquement ; d’autres pierres semblables se trouvaient vers la gauche , à même distance, mais la plupart ont disparu. On croit qu’un cimetière Gaulois existait autour .
D’après une tradition, le Christ traversait un jour le col ; il rencontra là un berger gardant son troupeau et lui demanda du pain ; l’aumône lui fut brutalement refusée et le berger excita son chien contre Jésus. Celui-ci , indigné, le maudit : le chien et le berger furent transformés en pierres , et la pierre principale n’est connue dans le pays que sous le nom de « l’Homme de Pierrefitte »
A droite , on rencontre une grotte profonde ; personne n’est descendu jusqu’au fond, mais quand on y jette une pierre on l’entend rouler pendant assez longtemps ; c’était, croyons- nous , une retraite où se réfugiaient les druides .
Si nous passons au village, nous savons qu’il y avait à la fin du XVème siècle , trois maisons principales dont l’une appartient aujourd’hui aux Bernadon et la seconde aux Cargue ; la troisième , qui est le château actuel , est la propriété des Bedin et des Baylac . Si nous nous en rapportons à la chronique locale , les Cargue étaient au XVème siècle , de bons bourgeois de Cathervielle ; ils étaient trois frères et avaient une sœur d’une beauté ravissante . Le seigneur de l’endroit s’éprit de la jeune Amélie ; un jour , il envoya les frères à la chasse et attira la jeune fille dans sa demeure ; là, poussé par une passion brutale , il lui fit subir les derniers outrages et la renvoya aussitôt. Dès que les frères apprirent cette nouvelle ils se rendirent au château et sommèrent le seigneur d’épouser leur sœur sans retard. Sur son refus , l’aîné tira son couteau de chasse et le poignarda. Il fut jugé et condamné à mort ; le roi réforma la sentence et se contenta de bannir les trois frères de la vallée du Larboust. Ils passèrent donc la montagne et furent s’établir à bourg où ils construisirent les trois maisons dont nous avons parlé plus haut et où ils ne tardèrent pas à devenir les trois personnages les plus notables de la commune ..
Idiome
On parle un dialecte du patois gascon ; les radicaux celtes et ibériens du peuple conquis y abondent ; mais ce qui domine ce sont les expressions latines à peine défigurées , les tournures de phrase et les terminaisons du peuple conquérant. Nulle part, ni en Italie, ni en Espagne , ni au Portugal, les Romains n’ont laissé une empreinte si profonde sur la langue ; les montagnards y ont seulement mêlé toute l’âpreté et toute la rudesse de leur caractère . L’idiome parlé est peu harmonieux et ne se prête pas à la poésie ; je ne connais pas un seul chant local .

Mœurs ; alimentation
Le trait distinctif des habitants , c’est leur fierté excessive ; ils ont, du reste , des manières nobles et pleines de grandeur qu’on ne retrouve guère dans les villes les plus civilisées . Aussi regardent-ils avec quelques dédain ceux qui sont originaires des autres communes . Ceux-ci s’en vengent en les désignant sous le qualificatif insultant et immérité de » Nobles Bâtards de Bourg » .
L’autorité de l’homme est respectée par les mères par les sœurs et par les épouses ; aussi salue-t-on avec joie , dans les familles , la naissance des garçons . quand une femme est sur le point d’accoucher, les jeunes gens sont sur le qui-vive ; si c’est un garçon qui naît, ils annoncent l’heureuse nouvelle par des décharges de fusils ; si c’est une fille , ils retournent en silence dans leurs demeures, prennent une quenouille et vont tristement la suspendre sur la porte du père infortuné. On place son point d’honneur à offrir une hospitalité large , et généreuse et quasi seigneuriale ; dans les fêtes on y accourt de toute la vallée d’Oueil, du Larboust et du bas Luchon ; ces réunions sont animées et rendues charmantes par l’entrain qu’on y déploie .
Serviables les uns pour les autres , d’une politesse exquise ils ne se refusent ni les chevaux ni les vaches dont on a besoin pour les voyages et les travaux , et sont toujours heureux d’êtres utiles aux autres .
On n’y connaît pas d’artisan ; chacun élève les murs de ses maisons et de ses écuries , fait les charpentes, couvre les toits , fabrique ses chaises, ferre ses chevaux. Industrieux et économe l’homme tire parti de tout , et la femme l’aide toujours dans l’intérieur de la demeure , aux champs et dans les prairies .
La brebis et le porc salés sont le fond de la nourriture , on y mêle beaucoup de légumes et de laitage. Le vin est rare et on n’en boit guère que dans les fêtes et à l’époque des travaux les plus pénibles . Le pain est fait à la maison ; il est quelquefois de méteil et le plus souvent de seigle ou d’orge.
Monuments
Je n’ai rien à ajouter sur le monument celte et sur la grotte de Pierrefitte . – Le château de bourg est du XIVème siècle et porte la date de MCCCLII. Il est délabré, mérite peu d’attention et je n’ai vu nulle part ces magnifiques bas-reliefs dont parle M Joanne dans sa Géographie de la Hte-Garonne . La maison Cargue porte la date de MCCCLI ; sa porte d’entrée et ses fenêtres géminées sont du style le plus pur et fouillées avec un talent remarquable ; elle avait une tour qui a été détruite ; les pierres ont servi à construire la maison Comet .
L’église est du XVème contrairement à ce qu’affirme M.Mérée-Boubée, qui en fait un monument du XVIIèmè siècle, et garde les inscriptions placées sur la porte comme indéchiffrables . Le médaillon placé à gauche est indéchiffrable en effet ; parce qu’il se compose de noms propres tronqués ; il n’en est pas de même de l’inscription de droite que je reproduis scrupuleusement :
BAR ANNO dir M.CCC.LXXXIII. ( )
L’église a donc été bâtie à la fin du XVème siècle , probablement par les mêmes ouvriers qui ont construit la maison Cargue , le château de Bourg et l’ancien château de Caubous . Ces ouvriers étaient des Bareilles . Voulant laisser une trace de leur passage , ils ont tracé sur un rocher de Pierrefitte , un croquis du château de Caubous , que l’on voit encore . A côté sont des noms propres tronqués.

Archives
La mairie est dépourvue de tous documents authentiques , des maires inintelligents s’étaient dépouillés des anciens parchemins, et, en leur absence , la commune perdit ses forêts par suite d’un procès intenté par l’Etat. Les seuls documents connus sont des actes que possèdent : M.Comet , M.Gerdessus et M. le curé de Cirès ; la plupart consistent en « Aveux et dénombrements » ; le plus important, concernant à la fois Bourg, Cirès, Caubous, Mayrègne, Benqué, a été acheté par M. le curé de Cirès. Il n’existe pas de monographie ni d’ouvrage s’occupant spécialement de Bourg.
Annexe au titre IV --- Enseignement
Avant la Révolution l’école était faite par les curés ; ils la reprirent de 1801 à 1815 . Il y eut des Instituteurs libres non brevetés qui faisaient la classe pendant l’hiver. En 1840 ont été envoyés par le Gouvernement des Instituteurs diplômés et c’est seulement depuis lors que les études sont devenues régulières .
Il n’y a pas encore de maison d’école . On a loué chez Monsieur Bernadon une salle qui en tient lieu. Ses dimensions sont : 7 mètres de longueur , 5 mètres de largeur et 3 mètres de hauteur. Il serait désirable qu’une maison se construise au plus tôt ; les autorités promettent beaucoup ; la vérité est qu’on est mal disposé et qu’il est impossible de rien obtenir si la Préfecture et le Ministère n’agissent pas énergiquement.
En hiver, les classes sont suivies avec soin ; il n’en est pas de même en été ; les domestiques étant rares, les parents se servent des enfants, soit pour les travaux, soit pour la garde des brebis . Cela est d’autant plus regrettable que les filles et les garçons sont doués d’une heureuse mémoire et ont beaucoup d’intelligence . Depuis plusieurs années il n’y a pas de conscrit illettrés et tous les conjoints ont pu signer leur acte de mariage .
Tous mes efforts ont échoué pour la formation d’une bibliothèque qui rendrait de véritables services ; je me heurte contre une mauvaise volonté systématique ; on n’a pas même voulu m’allouer une indemnité de logement. A plus forte raison consentirait-on à rien faire pour l’achat de quelques livres.
Une délibération avait été prise dans le but de fonder la Caisse des Ecoles ; elle n’a amené aucun résultat. Les parents sont de même opposés à la Caisse d’Epargne et pas un enfant n’a pris son livret .
Le traitement de l’Instituteur est de 700 francs ; le loyer de la salle d’école est de 100 francs ; quant à l’indemnité de logement, ai-je dit plus haut, elle a été refusée ; je suis obligé de la prélever sur mon maigre budget. L’Administration comprendra sans peine qu’il y a urgence à exiger la construction d’une école ; une partie des frais peut être facilement supportée par les habitants , qui sont tous dans une aisance relative .
Bourg-d’Oueil , le 1er Mai 1886
L’Instituteur Signé Serres
ANNEXE : Notes explicatives recherchées par Robert Castebrunet.
(1) Saxifrage : Famille des saxifragacées , plante herbacée qui pousse au milieu des pierres , et dont on cultive certaines espèces ornementales . Plante à fleurs , dialypétale et dicotylédone . Même famille : hortensias, seringats.
(2) Aster Pyrenaeus : Cette Composée est une des plus rares et des plus belles espèces de la flore Pyrénéenne, Larges capitules d’un jaune vif, entourés de ligules rayonnantes d’un bleu profond . Floraison tardive , fin août et septembre. A failli disparaître à cause de cueilleurs indélicats. Plante protégée .
(3) Carabidés : Famille des Carabidés, 15000 espèces de Coléoptères . Très utile car il dévore, larves d’insectes, limaces, escargots : Carabe doré : nom usuel : Jardinière.
(4) Chrysomèle : Insecte coléoptère brillamment coloré dont les nombreuses espèces vivent sur diverses plantes .
(5) : Cantharides : Insecte Coléoptère vert doré, long de 2 cm , fréquent sur les frênes et qui était utilisé dans la préparation des vésicatoires et d’aphrodisiaques .
(6) Lépidoptère : Insecte à métamorphoses complètes ; la larve : chenille, la nymphe : chrysalide ; l’adulte : papillon.
(7) Mustella-Herminéa : Hermine blanche ; famille des Mustelidés : mammifère carnassier aux pattes courtes, souvent buveur de sang tel que la belette, l’hermine , le putois, le furet, les martres.
(8) Coudrier : noisetier.